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Revue A.R.T. n°8

Actes des doctoriales de l'année 2022.

L'apparence suivant Marcel Conche - Marc Miginiac

Mots-clefs : Naturalisme, présocratiques, aléatoire, athéisme.

Après quelques notions de métaphysique qui permettent de considérer ce qui constitue le Tout pour un philosophe naturaliste, nous définirons l’apparence. L’apparence, c’est la manière dont la chose en soi se révèle à notre connaissance. Pour Marcel Conche, elle est ni apparence-de, ni apparence-pour, mais apparence globale, absolue. L’intervention du temps, transforme alors cette apparence en Être, perdu dans le temps éternel.

Le regard des lecteurs sur La Nouvelle Héloïse à l’époque de la publication ― La « Seconde préface » comme un portrait du lecteur idéal ― Kentarô Ôyama

Mots-clefs : Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse, réception, « Seconde préface », le lecteur idéal

De nombreuses études ont permis de mettre au jour les différents aspects de la réception de La Nouvelle Héloïse. Cependant, il nous paraît utile de questionner plus avant la relation qui s’établit entre Rousseau et ses lecteurs. La première partie du présent article portera sur la réception de La Nouvelle Héloïse à l’époque de la publication. Nous nous appuierons notamment sur les critiques de Friedrich Melchior Grimm et de Voltaire pour montrer que l’opposition idéologique entre Rousseau et les philosophes de son époque se traduit par un jugement extrêmement sévère portant sur l’œuvre et la pensée de l’auteur, autant que sur sa personne elle-même. Nous examinerons par ailleurs la critique de d’Alembert pour montrer que celui-ci, loin de partager l’opinion de la doxa, exprime un avis personnel, fondé sur les impressions qu’il a ressenties à travers une lecture spontanée, libre de tout jugement préconçu, sensible à la psychologie des personnages, une lecture dans laquelle il ressent l’amour tendre et passionné que se vouent Julie et Saint-Preux comme si c’était une expérience qu’il aurait lui-même vécue dans sa propre vie. Dans la seconde partie de notre article, nous examinerons la réponse de Rousseau aux critiques de ses contemporains. Nous nous appuierons tout d’abord sur les deux préfaces qu’il a données à La Nouvelle Héloïse pour mettre en évidence la fonction du dialogisme dans la défense qu’il entend donner à son œuvre. Dans la « Seconde préface », en particulier, il décrit son lecteur idéal sous la figure d’un couple de lecteurs qui sont en même temps mari et femme, un couple d’amoureux vieillis qui, devant les amours contrariées de Julie et Saint-Preux, peuvent mesurer l’étendue de leur propre bonheur. Nous en appellerons ensuite aux Dialogues : Rousseau juge de Jean-Jacques, pour montrer que le dialogisme n’induit pas seulement une relation à deux. Entre la fonction de l’auteur ― Rousseau ― et celle du narrateur ― Jean-Jacques ― s’établit la fonction du lecteur ― dénommé « un Français » ―. La constitution du dialogue se noue ainsi à travers trois fonctions associant l’auteur, le narrateur et le lecteur. La lecture idéalisée par Rousseau dans La Nouvelle Héloïse n’est possible que si la nature des liens qui unissent les protagonistes du dialogue est favorable à la construction d’une entente. Il faut que les trois protagonistes s’accordent sur un point de vue partagé pour que survienne l’unité au terme du dialogue. Un tel accord est impossible si l’un des protagonistes est aveuglé par une idéologie doctrinale, comme c’est le cas des philosophes contemporains qui poursuivent Jean-Jacques Rousseau de leur mépris. L’absence de préjugé, l’ouverture d’esprit, une réflexion sincère fondée sur l’expérience personnelle, sont les premières conditions d’une quête que Rousseau poursuivit tout au long de son œuvre que l’on pourrait résumer comme une quête du lecteur idéal.

Figures diasporiques : transferts linguistiques et culturels chez Ananda Devi, Jhumpa Lahiri, Shumona Sinha et Chitra Banerjee Divakaruni - Cécile Bonnemaison-Rullon

Mots-clefs : diaspora, tiers espace, Inde, culture, langue.

Cet article réfléchit à la représentation de la figure diasporique dans les oeuvres d’Ananda Devi, Jhumpa Lahiri, Shumona Sinha et Chitra Banerjee Divakaruni. En mettant en perspective les portraits des protagonistes féminins et le questionnement stylistique autour de la langue postcoloniale, on montrera comment les oeuvres du corpus étudié illustrent les transferts linguistiques et culturels au coeur des problématiques identitaires de la littérature de la diaspora indienne.

Le corps dans la poésie d'Antoine Emaz - Marcia Marquez-Rambourg

Mots-clefs : Emaz, écriture, corps, perception, sensible

La poésie d’Antoine Emaz est marquée par une langue exempte de débordements qui nous renvoie autant à une réalité « concrète » qu’à une pensée poétique qui circonscrit le poème dans un dialogue mots/monde dépourvu de toute artificialité : « Je me fiche de la “beauté” d’un poème : seules sa nécessité et son efficacité m’importent […]. Cette pragmatique linguistique indéniable de la poésie d’Emaz, qui ponctue le parcours du texte vers sa réception, c’est-à-dire qui marque la transitivité du poème sans laquelle il n’existe pas, ponctue également le parcours d’un corps dans l’écriture du poème ; d’un corps qui embrasse et qui définit un monde « qui passe quand il veut »;  d’un corps, enfin, qui décrit une réalité et un temps ; en dessinant un topos poétique qui se veut très proche d’une perception « réelle »