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Revue A.R.T. n°10

N° 10 : Le détour (mai 2025)

Introduction Cécile Margelidon et Thibaut Marin

Au sommaire

Eva d'Estais (Sorbonne Université - STIH) - Le verbe voir comme introducteur privilégié de la digression dans les derniers récits des Essais de Montaigne (III, 13, « De l’expérience »)

Mots-clefs : digression, Montaigne, verbe voir, stylistique, syntaxe.

Résumé : Dans les Essais, le verbe voir sert volontiers d’embrayeur à des digressions narratives en forme d’exemples historiques ou de témoignages. Dans les quatre derniers récits de l’œuvre, au sein du chapitre III, 13, le conteur Montaigne et ses personnages deviennent les spectateurs de visions issues de récits historiques, entre contemplation et humour. Le primat du visuel transforme ces récits en images, à travers l’usage des propositions infinitives, des énoncés attributifs et des instruments syntaxiques de la concision propres au récit anecdotique. Ce déploiement de l’image met en évidence un art de l’anecdote qui repose sur la visualisation.

 

Florence Louvet (ICP, Chaire ICP-Essec) - L’Amérique, un détour fécond pour l’anthropologie de Marcel Jousse (1886-1961)

Mots-clefs : Anthropologie du geste, verbomoteurs, Marcel Jousse, Amérique, sign language.

Résumé :  Cet article explore l'impact décisif du séjour de Marcel Jousse aux États-Unis (1918–1919) sur l’émergence de sa pensée anthropologique. Confronté à la diversité culturelle, linguistique et sociale américaine, Jousse forge les bases de son « anthropologie du geste », centrée sur la dimension verbo-motrice de l'expression humaine. Son expérience auprès des autochtones et ses échanges intellectuels nourrissent une approche dynamique de l’être humain. Ce détour géographique se révèle ainsi être une étape fondatrice dans l’élaboration de sa méthodologie. Sans ce détour, l’œuvre anthropologique de Jousse n’aurait probablement pas vu le jour.

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Julien Daillère (Université Jean Moulin Lyon 3, CERCC) - Les fictions de l’élevage industriel, un objet littéraire hybride au carrefour des crises contemporaines: Le détour par le réel comme hypothèse épistémologique

Mots clefs :  interdisciplinarité, élevage industriel, fiction, genre littéraire, réalisme.

Résumé :  En ce premier quart de XXIe siècle, les menaces économico-sociales et environnementales qui pèsent sur les sociétés occidentales n’ont jamais paru aussi prégnantes et urgentes, obligeant les écrivains à s’emparer de ces questions et à faire un détour par le réel. Dans cet article, je commencerai par effectuer moi-même un détour sur ma posture de chercheur puisque la question de « l’élevage industriel » est un fait complexe à cerner qui intéresse de multiples disciplines. Mais ce détour permet de mieux saisir l’émergence et le fonctionnement d’un genre en gestation dans les littératures occidentales : à une triple crise sociale, rurale et environnementale répond en miroir un ensemble d’œuvres qui croisent à des degrés divers roman social, roman paysan et écofiction : cette singularité permet de mieux situer le genre hybride des fictions de l’élevage industriel.

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Marc Miginiac (Université de Tours, ICD) -  Le « détour aléatoire » ou la notion de hasard chez Marcel Conche

Mots-clefs : hasard, athéisme, liberté, naturalisme, présocratiques.

Résumé :Le détour signifie dans son sens premier, géographique, « le tracé, le trajet, l’itinéraire qui s'écarte de la ligne droite, du chemin direct » (Dictionnaire de l’Académie française). Il s’agit de « l’élément contraint qui empêche de parvenir droit au but, il se pense dans son rapport à l’objectif que l’on se fixe ». Tourner autour d’un axe, convertir ou pervertir, détourner, qui a le sens d’« écarter quelqu’un d’une direction donnée », font partie de la signification du terme.

On peut ajouter aussi le vocable de déviation à ces définitions du détour. Si l’on s’appuie sur la définition du mot chez les épicuriens, le clinamen détourne, écarte, l’atome de son tracé vertical dans sa chute. Il dévie bien et détourne l’atome de son chemin, entrainant ce que nous appelons la survenue du hasard avec la liberté.

Comment Marcel Conche définit-il le hasard ? Comment lui attribue-t-il cette liberté qui est laissée à l’homme ? Comment place-t-il le libre-arbitre ?

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